Vente des Chantiers de l’Atlantique

Le paquebot MSC Bellissima aux Chantiers de l'atlantique. Crédit : Martin Launay, Ville de Saint-Nazaire - Agrandir l'image, .JPG 59Ko (fenêtre modale)

Déclaration de David Samzun, maire de Saint-Nazaire et Président de la CARENE, Saint-Nazaire Agglomération

Alors que la date butoir pour le rachat des Chantiers de l'Atlantique par le groupe italien Fincantieri a été repoussée au 31 décembre par l’Etat français, pour permettre à la Commission européenne de poursuivre l'examen du dossier, je souhaite, en tant que maire de Saint-Nazaire et président de l’agglomération, réitérer mon opposition à cette vente.

La pandémie du Coronavirus a mis crûment en lumière notre dépendance aux importations, dans des domaines de plus en plus stratégiques. Il a suffi que des régions chinoises stoppent leurs productions pour que de nombreux secteurs économiques soient désorganisés. Cela a conduit l’Etat à parler enfin industrie, réindustrialisation et relocalisation. Mais la première des sagesses dans ce domaine, c’est avant tout de ne pas perdre la maîtrise de nos outils. Avant de relocaliser, évitons de délocaliser.

Car le projet de vente à Fincantieri apparait de jours en jours pour ce qu’il est : un projet de délocalisation au profit d’un conglomérat intégrant la Chine. Ainsi, le constructeur chinois CSSC a lancé, le 10 novembre dernier, la construction d’un paquebot de 2 800 cabines en partenariat avec Fincantieri. L’Italien assume désormais de donner des plans aux Chinois, mais aussi de transférer savoir-faire et surtout organisation, ce qui est le cœur de la chaine de valeur d’un paquebot.

Une délocalisation inacceptable tant du point de vue des compétences historiques des Chantiers de l’Atlantique en termes de construction de paquebots, que du point de vue des compétences nouvelles qu’ils développent, avec l’ensemble du tissu industriel régional, autour des énergies marines renouvelables, des nouveaux modes de propulsion, bref autour de tout ce qui est au cœur de la transition écologique et énergétique de notre pays.

Comment l’Etat français, comment la Commission Européenne, pourraient accepter de faire un tel cadeau à la Chine, dans un domaine où notre savoir-faire est reconnu ? Alors que l’Union Européenne sort de sa naïveté, pour enfin appeler un chat un chat et qualifie désormais la Chine de « rival systémique » et de « concurrent stratégique », on ne peut imaginer un tel transfert. De la maîtrise de la 5G à la Nouvelle Route de la Soie, en passant par les expériences malheureuses de l’aéroport de Toulouse par exemple, les dossiers de friction ne manquent pas. Ils doivent nous inciter à la plus grande prudence.

En parallèle, que constatons-nous ? Le plan de charge des Chantiers se maintient à bon niveau malgré la crise, preuve de la confiance des clients. L’annonce que la construction du Porte-Avion Nouvelle Génération (PANG) ne peut se faire qu’à Saint-Nazaire, seul chantier disposant des formes assez grandes, souligne par ailleurs son rôle essentiel en matière d’indépendance nationale. Toutes ces raisons doivent conduire l’Etat à considérer un plan B pour le rachat des Chantiers de l’Atlantique, qui est plus que jamais souhaitable. J’ajoute qu’il est possible, des personnes sérieuses se présentant et crédibilisant une solution mêlant acteurs locaux et capitaux français. J’appelle donc de mes vœux un mouvement et une expression de l’Etat afin que ces savoir-faire et l’avenir industriel de notre pays soient préservés.